« Une ligne entraîne l’autre, toujours… je dessine quelque chose qui me donne subitement l’idée de dessiner quelque chose d’autre qui me donne aussitôt l’envie de dessiner, etc. Voyez-vous, je dessine, puis je réfléchis. Pour moi, c’est une activité littéraire, morale. »
Saul Steinberg

11.3.11

Une valse, eh oui, une valse

Léa ne parle jamais de Maurice à quiconque, sinon à Sara. À Pridami, les copines lui racontent leurs vies, plus ou moins en détail, plus ou moins romancées, plus ou moins réjouissantes, et essaient de convaincre Lucinda de sortir un peu de temps en temps. À Multi-Tissus, l’atmosphère feutrée, cotonneuse — allons jusqu’à soyeuse — voire étoffée —, épargne à Léa les éclats de ce genre de discours.
En revanche, Léa, comme Lucinda, y parle de ses lectures.
Parler de Maurice serait trop compliqué, de Maurice et moi encore plus, a-t-elle écrit un jour à Sara, car les gens croient toujours devoir comprendre, qui lui répondit combien il lui plaisait pour sa part que jamais on ne sache où elle en est, ce qui, en quelque sorte, revient au même.

Pourtant,
Léa a rencontré Maurice sur une piste de danse. Il était le seul à savoir valser comme sa coiffure surannée le présageait. De surcroît il valse comme un dieu, je te jure, écrivit-elle à Sara, et même le rock… à sa manière ! Maurice lui murmura seulement que son frère était autrement meilleur, qu’il dansait le tango comme un vieil Argentin (ou un vrai Argentin).