« Une ligne entraîne l’autre, toujours… je dessine quelque chose qui me donne subitement l’idée de dessiner quelque chose d’autre qui me donne aussitôt l’envie de dessiner, etc. Voyez-vous, je dessine, puis je réfléchis. Pour moi, c’est une activité littéraire, morale. »
Saul Steinberg

11.3.11

Une dangereuse leçon de perspective

C’était l’idée de Maurice. Souvent les idées sont de Léa. Les idées de Maurice, il les garde pour lui — ou bien n’en aurait-il guère à partager ? Cette fois-ci, cette idée-là, Léa l’accueillit avec joie.
— Alors on y va.
Nous étions dimanche. Comptons les dimanches sans promenade. Ça s’embrouille. Sauront-ils seulement encore se promener, eux qui n’auraient jamais su sans les leçons des livres et celles de Sara qui n’en revenait pas qu’on eût du goût pour le kitsch des jardineries. Maurice et Léa se défendaient mollement. C’était inavouable. Ça leur appartenait.
Une fois sur le pont, ils attendirent le passage d’un train.
Maurice guette un panache de fumée bien qu’il sache que c’est idiot. Léa s’est accoudée sur le mur de pierre, elle fixe le point d’horizon où tous les traits se rassemblent pour donner une leçon de perspective.
Un train se signale. Léa s’empare du bras de Maurice, à l’arracher…