« Une ligne entraîne l’autre, toujours… je dessine quelque chose qui me donne subitement l’idée de dessiner quelque chose d’autre qui me donne aussitôt l’envie de dessiner, etc. Voyez-vous, je dessine, puis je réfléchis. Pour moi, c’est une activité littéraire, morale. »
Saul Steinberg

11.3.11

Débat autour de la promenade

Sara a toujours l’embarras du choix question promenades, à moins qu’elle embarrasse Maurice et Léa avec le choix qu’elle leur soumet afin de les détourner de leurs jardineries — disons entre Green Garden & Co et Paysage & Jardin Concept, maintenant que Naturalia a épuisé ses charmes — comme elle leur avait proposé le choix entre le côté de Meinkirchen et le côté de chez Wink en se camouflant derrière une lecture quelque peu frelatée.
Ce dimanche, Sara a détourné Maurice et Léa de leur objectif — alors qu’ils ne s’étaient pas encore interrogés sur le choix entre le côté de Green Garden & Co et le côté de Paysage & Jardin Concept, Léa ne pouvant se défaire de sa lecture dévorante bien au-delà du samedi consacré à ce vice impuni, car, à peine l’avait-elle terminée qu’elle la reprenait à son début — pour les entraîner à venir marcher dans la nature.
En chemin, à la première halte précisément, pour reprendre son souffle et regarder alentour, Léa poursuit sa lecture qu’elle avait interrompue à contrecœur car le livre, qui célèbre l’amitié comme jamais l’amitié fut célébrée, n’offre pas le moindre interstice pour s’arrêter, reprendre souffle, regarder alentour.
— « S’il y avait des amis chez moi, il faisait des promenades avec mes amis et moi, à contrecœur, mais il les faisait. Moi non plus je n’aime pas les promenades, depuis toujours je ne me promène qu’à contrecœur, c’est toujours à contrecœur que je fais des promenades, mais avec des amis, je fais des promenades, et de telle manière que ces amis s’imaginent que je suis un promeneur passionné, car je me promène toujours de manière si théâtrale qu’ils n’en reviennent pas. Je n’ai absolument rien d’un promeneur, et je ne suis davantage un ami de la nature ni quelqu’un qui connaît la nature. »
Sara, puis Maurice, poursuivent la promenade en faisant semblant d’abandonner Léa.
— « Mais quand des amis sont là, je marche de telle manière qu’il s’imaginent que j’aime me promener, que j’aime la nature et que je connais la nature. Je ne connais absolument pas la nature, et je la déteste, parce qu’elle me tue. »