« Une ligne entraîne l’autre, toujours… je dessine quelque chose qui me donne subitement l’idée de dessiner quelque chose d’autre qui me donne aussitôt l’envie de dessiner, etc. Voyez-vous, je dessine, puis je réfléchis. Pour moi, c’est une activité littéraire, morale. »
Saul Steinberg

11.3.11

Un client pas comme un autre

— « Ah ! si je savais dire comme je sais penser ! Mais il est écrit là-haut que j’aurais les choses dans ma tête, et que les mots ne me viendraient pas. »
En bon vaguemestre monsieur Roups transmet le message de son cher client qui depuis longtemps est bien davantage qu’un client. Maurice l’écoute sans comprendre. Léa comprend. Au moment de poursuivre, monsieur Roups hésite.
— Zut, j’ai oublié, j’aurais dû noter.
Léa était déjà allé chercher un livre dans la bibliothèque.
— « Ici Jacques s’embarrassa dans une métaphysique très subtile et peut-être très vraie. Il cherchait à faire concevoir à son maître que le mot douleur était sans idée, et qu’il ne commençait à signifier quelque chose qu’au moment où il rappelait à notre mémoire une sensation que nous avions éprouvée. »
— Voilà, c’est ça ! Comment vous avez fait pour trouver ? dit monsieur Roups.
Et Maurice comprend (Alain est tout de même le frère de Maurice).

La maladie d’Alain n’a rien d’inquiétant sur le plan vital. Une fatigue comme s’il avait marché à travers le désert sans boire et sans manger. Il ne parle plus. Il s’exprime par gestes et écrit des divagations sur les murs de sa chambre.
Monsieur Roups ignore que ces divagations sont de Diderot.