« Une ligne entraîne l’autre, toujours… je dessine quelque chose qui me donne subitement l’idée de dessiner quelque chose d’autre qui me donne aussitôt l’envie de dessiner, etc. Voyez-vous, je dessine, puis je réfléchis. Pour moi, c’est une activité littéraire, morale. »
Saul Steinberg

11.3.11

Le nouveau passage des éléphants

Maurice regarde par la fenêtre. Il pleut. Ristourne fait des palinodies de chat avant de sortir, ou pas. Une théorie de camions rouge et jaune rend au boulevard de la Fraternité un air enfantin et joyeux. Les klaxons ne sont pas tous d’accord avec cette appréciation.
Léa pioche dans Montaigne. Elle n’a jamais pu se décider à le lire. Pourtant, la rue perpendiculaire au coin du 87 porte son nom.
— Maurice, tu peux fermer la fenêtre s’il te plaît.
— C’est le chat, il ne sait pas se décider.
— Le chat a bon dos.
— Je t’assure Léa, dès qu’il aura opté pour un côté ou l’autre, je fermerai la fenêtre.
— C’est quoi tous ces klaxons ?
— Un cirque, enfin c’est à cause d’un cirque tout ce bazar que ça râle comme ça.
— Faut toujours qu’il y ait des rabats-joie.
— Il doit s’installer place de la Girafe.
— Sans doute Maurice.
— On entend même barrir les éléphants !
— Sans doute Maurice.
Maurice se tourne vers Léa pour vérifier son effet.
— Mais si bien sûr que je ris, Maurice, tu es si drôle.

— « En mes écrits mêmes, je ne retrouve pas toujours l’air de ma première imagination ; je ne sais pas ce que j’ai voulu dire, et m’échaude souvent à corriger et y mettre un nouveau sens, pour avoir perdu le premier, qui valait mieux. »